Actionnaires dirigeants : La décision Salaire ou Dividende
Annuellement, lorsque l’on parle de rémunération globale des actionnaires dirigeants, l’un des aspects à prendre en considération est le choix entre le salaire et le dividende pour couvrir leur coût de vie. Certes, la rémunération globale de l’actionnaire est plus complexe que cela, mais je me concentrai sur ce choix dans ce présent article. On s’entend, il pourrait combler une partie de son coût de vie d’autres façons (vente d’un bien, héritage, dividende du CDC, emprunt personnel, encaissement CÉLI, etc.).
Donc, salaire ou dividende ? Ça dépend, et ça dépend beaucoup, croyez-moi !
Pour baliser ce choix de manière scientifique, on propose une structure rigoureuse à 3 étapes (merci à BGY Services financiers intégrés pour cette méthode) :
1- On fait des mathématiques fiscales pures
a. Pour un salaire donné, on calcule le montant disponible pour le coût de vie, une fois les cotisations et les impôts personnels soustraits.
b. Pour obtenir le même coût de vie, on calcule le dividende qu’il faut se verser. Ce montant sera certainement moindre que le salaire, car le taux d’impôt personnel est moins élevé et qu’il n’y a pas de cotisations, sauf le FSS.
c. Une fois ces montants de salaire et de dividende obtenus, on trouve l’effet de ceux-ci sur l’argent disponible dans la société. Le dividende étant une distribution des profits nets alors que le salaire est une dépense pour la société, la société aura un bénéfice plus élevé avec l’option dividende et paiera plus d’impôt. En contrepartie, avec l’option salaire, la société aura à payer le salaire et sa partie des cotisations RRQ, RQAP, FSS. Son bénéfice sera plus bas et ainsi ses impôts.
Après cette étape, on arrive avec une différence d’argent disponible dans la société. Si le salaire est gagnant à cette étape, il le sera aussi au terme des deux étapes restantes; celles-ci ne pouvant qu’améliorer le sort du salaire.
2- Calcul de la valeur de la cotisation à la RRQ
À cette étape, on doit se demander ce que vaut la cotisation personnelle à la RRQ. Le salaire permet cette cotisation, le dividende non.
On cherche à trouver la valeur, en dollars d’aujourd’hui, de l’augmentation future de la rente de l’actionnaire dirigeant du fait de cotiser à une année de plus. Il ne faut pas oublier que la rente de la RRQ a une grande valeur pour un client moins fortuné qui a besoin d’un filet social.
3- Un placement dans un REÉR ou dans une société ?
L’option du salaire donne la possibilité de cotiser au REÉR. Ce n’est cependant ni obligatoire ni automatique. Il faut déterminer où l’actionnaire dirigeant est mieux d’accumuler son argent entre un REÉR et sa société.
Personnellement, pour l’actionnaire, la cotisation à son REÉR n’a aucun effet. Son salaire monte et il est ensuite réduit du même montant dans le calcul du revenu net. Il a toujours la même somme disponible pour son coût de vie. Il n’a pas à sortir plus d’argent que son coût de vie, la différence dans la société pour bénéficier de l’effet du report d’impôt (on pourra parler dans un autre texte de sortir davantage pour cotiser au CÉLI, au REEE, etc.).
Pour la société, il y a plus de salaire à verser, plus de FSS et moins d’impôt, car plus de déduction.
Il y a un certain écart entre les deux et l’argent n’est pas à la même place. À cette étape, on calcule donc la valeur, en dollars d’aujourd’hui, de la différence entre les deux options une fois liquidées (REÉR et société).
En général, plus un actionnaire a un profil d’investisseur audacieux, plus le placement devrait être fait dans la société.
Un peu compliqué tout cela ? Vous avez raison. Je vous dégage donc certaines tendances/conclusions à la suite du calcul de ces trois étapes :
a. Pour les sociétés à petit taux, l’écart est serré entre le salaire et le dividende après l’étape 1.
a. Plus l’actionnaire est âgé et conservateur, plus le salaire l’emporte.
b. Pour les sociétés à gros taux, le salaire gagne souvent après les étapes 1 et 2. Le salaire l’emporte encore plus si le coût de vie est élevé.
c. Pour les sociétés à moyen taux (sans les 5 500h, par exemple un professionnel incorporé), le choix du salaire est quasiment sans équivoque.
Comme vous le voyez, le salaire l’emporte souvent. Il est aussi un choix instinctif si vous prévoyez avoir un enfant, si votre société a droit au crédit de RS&DE, si vous payez des frais de garde, si un des actionnaires est plutôt passif, si la société offre un régime collectif, etc.
Si vous êtes un actionnaire dirigeant qui couvre son coût de vie avec des dividendes, questionnez-vous. Depuis la réforme fiscale du ministre Morneau de 2018, le dividende en a pris pour son rhume ! Il y a désormais une surimposition importante de plus de 5%. Cela veut dire que l’actionnaire aurait été mieux de gagner le revenu personnellement que de le gagner dans la société et de se le verser ensuite en dividende. Ça fait mal !
Chez Miller&Laflamme, on tente de briser les mythes et les raccourcis faciles. Enlevez-vous de la tête qu’il faut se rémunérer sous forme de dividendes, car c’est plus simple que et ça évite les cotisations salariales. D’un autre côté, évitez de justifier le salaire par la cotisation au REÉR. En effet, même si le salaire l’emporte dans les étapes, il faut toujours se demander s’il faut cotiser au REÉR ou pas; l’argent est peut-être mieux de rester dans la société ! Finalement, cette décision est annuelle. Ce qui est vrai à 35 ans ne l’est possiblement plus à 55 ans. Rassurez-vous, nous serons là, année après année. Il y a tant de facteurs à considérer, faites-vous accompagner.